Herbes de la St-Jean


Au solstice d'été sont cueillies les «Herbes de la St-Jean», considérées comme étant au paroxysme de leur force au moment où le soleil atteint sa hauteur la plus haute de l'année à midi et que le jour est le plus long. Parmi ces herbes, le Millepertuis (Hypericum perforatum L.) s'inscrit parmi les plus importantes.

Ce terme d'«Herbes de la St-Jean» est attribué à l'intervention du calendrier catholique romain, qui fit du 24 juin la fête de la St-Jean. Or, il semble que des processions en l'honneur du soleil étaient déjà, bien avant l'arrivée du Christianisme, réalisées. À titre d'exemple, les druides auraient célébré la Fête du solstice d'été en l'honneur du soleil (Belen), lors de la période des Ligures (dont les migrations se situent entre 7500 et 2500 avant Jésus-Christ).


À cet égard, Jacques Poisson («Aperçu sur la pharmacopée gauloise») mentionne:

Celles que l'on a appelées plus tard les «herbes de la Saint-Jean» étaient récoltées au solstice d'été selon un cérémonial ancestral païen déjà pratiqué par les Ligures et les Celtes et passé sous le contrôle des druides. Elles avaient une action plus magique que pharmacologique, encore que certaines soient encore en faveur aujourd'hui: orpin, millepertuis, lierre terrestre, salep, camomille, armoise, bardane, séséli, fenouil, sauge. Parmi des simples tout autant magiques figurent: la verveine, panacée aussi vénérée que le gui, elle aussi d'origine celtique (ferfaen). 


Dans «Les livrets de santé pour les pauvres aux XVIIe et XVIIIe siècles», de Mireille Laget, on explique comment la cueillette des herbes de la Saint-Jean était réalisée dans les campagnes françaises:

Le moment de la récolte avait une considérable importance, en fonction de la saison et de l'ensoleillement, des phases de la lune, de l'heure du jour, à tel point que certaines cueillettes étaient devenues rituelles: à la Saint-Jean, solstice d'été, on cueillait des plantes dont les huiles essentielles étaient activées par le soleil, mais aussi, pense-ton, par les grands feux allumés la nuit précédente. On les cueillait à midi, et on leur donnait toutes espèces confondues, le nom d'herbes de la Saint-Jean: ainsi a-t-on mis sous ce vocable l'armoise, la grande marguerite, le lierre, le millepertuis perforé. Les racines, par contre, comme la rave et la racine de patience, se récoltent le soir, à la tombée de la nuit, pour laisser pénétrer au maximum l'influence solaire.

 
Solstice d'été

Lors du Solstice d'été, l'hémisphère Nord est incliné vers le soleil, alors que l'hémisphère Sud en est éloigné, bien que la terre soit alors au plus loin du soleil (plus de 152 millions de kilomètres du soleil, par rapport à 147 millions en hiver). Cette inclinaison fait en sorte que les rayons arrivent plus près de la verticale sur l'hémisphère et chauffent ainsi beaucoup plus celui-ci qu'en hiver.










Comme Jean-Marie Pelt le mentionne dans «Variations sur les fêtes et saisons»:

Le solstice d'été célèbre le Soleil, et le Soleil, c'est le feu, symbole d'une très grande richesse, mais aussi d'une parfaite ambivalence. Comme le soleil par ses rayons, il symbolise par ses flammes l'action fécondante, purificatrice, illuminatrice. Mais le feu peut aussi couver sous la cendre: 
il symbolise alors une menace latente.  




Millepertuis 
Hypericum Perforatum L.
Famile des Hypéricacées

Autres noms communs: Herbe aux mille trous, herbe percée, herbe aux piqûres, chasse-diable, herbe de la St-Jean, herbe aux brûlures.

Hypericum provient du grec hyper et eikon («plus grand qu'une icône»), la plante étant réputée éloigner les mauvais esprits. Perforatum fait référence aux nombreux petits pores translucides du parenchyme.














Théorie des signatures
La théorie des signatures est la théorie par laquelle on attribuait, au Moyen-Âge, la physionomie d'une plante à une partie du corps humain que l'on désirait soigner. Selon Michel Denizot, dans «La théorie de la signature des plantes et ses implications», cette théorie a été très répandue aux XVIe et XVIIe siècles, bien qu'elle serait apparue bien avant:


Il est possible que son développement ait été lié à celui de l'alchimie
ésotérique. Les analogies de Belon (1555) et les écrits de Crollius (1624) sont trop
facilement considérés comme points de départ, comme ceux de Paracelse. Crollius
s'occupe notamment des liens entre les étoiles et les herbes, ce qui est à rapprocher
évidemment de l'astrologie, qui a pu précéder l'alchimie. Un autre rapprochement est à
faire avec les "caractères" dont on prétendait que chaque homme était marqué par l'astre
sous lequel il naissait. La signature a été appelée "caractérisme".   ¸



La Pulmonaire (Pulmonaria Offininalis),
aux feuilles tachées de blanc évoquant les alvéoles des poumons,
était considérée comme adoucissante et pectorale.

Toujours concernant la théorie des signatures, Bernard Beck, dans «Jardin monastique, jardin mystique. Ordonnance et signification des jardins monastiques médiévaux», souligne:

Ces signatures dont il fallait trouver le sens, s'intègrent à cette conception typiquement médiévale du monde selon laquelle ce ne sont pas les choses en elles-mêmes qui sont importantes, mais la réalité spirituelle à laquelle elles renvoient.














Le Millepertuis et la théorie des signatures
Qu'en est-il de la signature attribuée au Millepertuis? Comme ses feuilles sont composées de plusieurs petits trous qui ressemblent à des pores, on recommandait cette herbe pour divers problèmes de peau. Aussi, on attribuait des propriétés vulnéraires, anti-inflammatoires et cicatrisantes à la plantes, puisqu'elle secrète un liquide rouge lorsqu'on l'écrase, associé à du sang.





Propriétés du Millepertuis
En interne, le Millepertuis agit essentiellement sur le système nerveux, alors qu'elle est considérée comme une plante anti-dépressive. En usage externe, l'huile de Millepertuis soulage les douleurs musculaires, articulaires et les coups de soleil, alors qu'elle est analgésique et anti-inflammatoire.


Cueillette
Selon Anny Schneider et Danièle Laberge («Ces fleurs qui soignent), il est préférable d'utiliser le Millepertuis à l'état frais, que ce soit pour la préparation de teintures ou d'huiles, alors que l'hypéricine* qui se trouve dans les fleurs est pratiquement éliminée lors du séchage. La plante ou les fleurs doivent être récoltées au début de la floraison ou tous les deux jours par beau temps si l'on ne cueille que les fleurs.

*Hypéricine: principal principe actif du millepertuis. Cette molécule a notamment pour effet de normaliser les neurotransmetteurs impliqués dans la modulation de l’humeur. 


Utilisations anciennes du Millepertuis au Solstice d'été
Dans le cahier d'HerbArt consacré au Millepertuis (Herbothèque, première année, quatrième trimestre), on mentionne:

Dans plusieurs pays, on en accrochait une branche à chaque année, le jour de la Saint-Jean, à la porte des maisons. Cette branche devait être cueillie la nuit de cette fête. On la portait sur soi toute la nuit, puis on en mettait sur les appuis des fenêtres et à l'entrée des portes. Elle protégeait aussi la maison contre le diable pendant toute l'année.

Le Millepertuis entrait également dans des rites d'exorcisme, on en faisait boire et respirer aux possédés, ce qui lui donna le nom de fuga daemonum, ou fuite des démons. Ce nom lui vient de l'époque druidique ou gallo-romaine. 





Teinture de Millepertuis*
- Fleurettes de Millepertuis ayant été cueillies vers midi lors d'une journée ensoleillée
- Vinaigre de cidre bio
- Bocal

Déposer les fleurettes dans un bocal, jusqu'aux deux tiers. Remplir la bouteille avec le vinaigre. Étiqueter et placer à l'ombre durant un mois. 
Remuer soigneusement, surtout les premiers jours. Filtrer.
Consommer entre 7 et 21 gouttes dans de l'eau trois fois par jour, avant les repas, pour un meilleur équilibre nerveux, une bonne digestion et un bon système immunitaire.

*Recette tirée du livre de Danièle Laberge et Anny Schneider, Ces fleurs qui soignent. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire